14 mai 2018 2242 mots, 9 min. de lecture Dernière mise à jour : 6 février 2022

Étude de marché : les 5 tendances qui vont changer le futur du retail

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Les études de marché les plus récentes ont permis d’identifier 5 tendances qui façonneront l’avenir du commerce de détail (retail) et en particulier celui des supermarchés : Impact de la crise du Coronavirus Les technologies et outils permettant d’améliorer la […]

Les études de marché les plus récentes ont permis d’identifier 5 tendances qui façonneront l’avenir du commerce de détail (retail) et en particulier celui des supermarchés :

  1. Impact de la crise du Coronavirus
  2. Les technologies et outils permettant d’améliorer la prise de décision
  3. Les innovations en matière d’affichage pour faciliter les décisions d’achat des clients en magasin
  4. L’importance grandissante d’une expérience client différenciante
  5. L’usage des données massives (Big Data)
  6. L’utilisation de l’analytique pour améliorer la rentabilité
  7. Études de cas

Dans l’article d’aujourd’hui, nous allons discuter et illustrer chacune de ces 5 tendances du marché.

Cet article a été mis à jour en Mars 2020 suite à :

  • un podcast que nous avons réalisé avec Olivier Delangre, CEO d’Amoobi, qui après un voyage aux États-Unis et au Royaume-Uni a partagé avec nous ses découvertes retail. Vous retrouverez les extraits audio de son interview en tête de chaque chapitre.
  • la crise du Coronavirus qui entraîne des changements de comportements importants

UPDATE : Impact de la crise du Coronavirus sur les achats en supermarché (31/03/20)

La crise du Coronavirus est en train de rebattre complètement les cartes en matière de comportements d’achats en supermarchés. Les changements que nous observons pourraient être durables et devenir des habitudes. Je ne parle même pas des faillites d’entreprises qui vont suivre les mesures de confinement et l’effondrement de la demande.

Quels sont de manière synthétique les 2 changements auxquels nous allons assister :

  • désaffection des points de vente physiques : les mesures de distanciation sociale vont laisser des traces et il est illusoire de penser que les clients vont se réapproprier facilement les supermarchés
  • déplacement de la demande vers les achats online : de nouveaux clients ont testé les achats online (drives, points de collecte) et ne sont pas prêts d’en changer. Les capacités de préparation de commandes vont devoir être renforcées et les moyens de les mettre à disposition également.

Les 5 tendances que nous avions anticipées (voir ci-dessous) sont impactées :

  • Tendance 1 : les magasins deviendront de plus en plus « automatisés » pour y passer le moins de temps possible. La personnalisation se fera de plus en plus online au moment des réservations faites par les clients
  • Tendance 2 : la mise en valeur des produits en rayon va voir son influence diminuer. De nouveaux moyens de mettre les produits en valeur en dehors de l’espace de vente physique vont devoir être pensés
  • Tendance 3 : l’expérience client va devoir être créée online plutôt qu’offline. Un défi de taille qui va amener les retailers à s’interroger sur les facteurs de satisfaction et de fidélisation online
  • Tendance 4 : le Big Data va voir son influence augmenter puisque les achats vont se porter de plus en plus online. D’un côté c’est positif car collecter des données online est plus facile. Mais de l’autre les données online risquent d’être moins riches que celles pouvant être capturées offline.
  • Tendance 5 : dans le prolongement de la tendance 4, les analyses de rentabilité seront plus importantes que jamais. A terme la rentabilité de points de vente physique sera remise en cause et on observera un désinvestissement dans ces derniers. Les derniers bastions du commerce physique vont tomber d’ici 5 à 10 ans.

1. Technologies et outils permettant d’améliorer la prise de décision

Plusieurs développements technologiques ont bouleversé notre façon de faire les courses et verront leur importance grandir dans les années qui viennent :

  • De plus en plus de personnalisation

    Grâce au cloud computing et au calcul distribué les achats liés aux cartes de fidélité pourront être mieux exploités en vue de proposer des offres personnalisées aux client. Dans le futur les améliorations technologiques permettront aux retailers de proposer des offres personnalisées en temps réel, par exemple par le biais d’applications mobiles.

  • Faire ses courses deviendra toujours plus aisé

    Tap Tap Go

    Le système Tap Tap Go en test chez Ahold permet de raccourcir le temps nécessaire pour faire ses courses en supprimant le besoin de passer en caisse

    À l’avenir faire ses courses deviendra encore plus facile et n’occasionnera plus de perte de temps. Proposer une telle amélioration de l’expérience client impliquera que les humains soient moins sollicités (car ils restent moins efficaces que la machine) notamment à la caisse. Des expériences comme AmazonGo aux Etats-Unis ou Tap-To-Go aux Pays-Bas se démocratiseront et finiront par remplacer d’autres systèmes permettant aujourd’hui d’éviter le passage en caisse tel que Quick Scan ou self-scan.

  • Croissance de la part de marché du commerce électronique

    Dans certains pays, la part de marché du commerce électronique est encore faible pour les biens de consommation courante (FMCG). Mais cette part de marché est appelée à croître. Les consommateurs ont de moins en moins de temps pour aller au supermarché et les commandes en ligne ne peuvent donc que se développer. Du supplément demandé pour la préparation de la commande dépendra le choix du client quant à la méthode de livraison : à domicile ou en point de collecte. Mais une chose est sûre : les clients prêts à affronter les affres d’un supermarché bondé le samedi après-midi se feront de plus en plus rares.



2. Innovations en matière de mise en avant des produits dans les points de vente

Comment se démarquer des concurrents lorsque les consommateurs n’ont que l’embarras du choix et sont submergés par les offres ?
Le cerveau d’un consommateur lambda n’est pas en mesure de traiter la quantité d’informations disponibles dans un supermarché. La charge cognitive est tout simplement trop élevée. La conséquence logique est que nous achetons toujours la même chose (80% de nos achats sont récurrents) et ne partons pas à la découverte de tous les produits disponibles en point de vente. 95% des produits présents en supermarché nous sont donc inconnus.

rayonnages intelligents

AWM propose des rayonnages intelligents qui profilent automatiquement les clients en magasin

Les supermarchés doivent changer la façon dont ils présentent leurs produits pour faciliter leur découverte et faciliter le traitement cognitif de l’information. Les rayons intelligents comme celui présenté par AWM vont évidemment être une tendance montante du marché du dans les années qui viennent (attention toutefois aux dérives potentielles).



3. Créer une expérience client différenciante

L’importance de créer des expériences client différenciées est une évidence même. Le Prof. Peter Verhoef propose une excellente définition de l’expérience client:

« Il s’agit de la réaction cognitive, affective, émotionnelle, sociale et physique du client vis-à-vis du retailer. Cette expérience n’est pas seulement créée par les facteurs que le détaillant peut contrôler […] mais aussi par des facteurs qui sont indépendants de sa volonté […] »

Nous sommes persuadés que l’avenir du commerce de détail se jouera en partie sur les liens affectifs que les retailers parviendront à tisser avec leurs clients. Plusieurs stratégies peuvent être utilisées par les retailers pour atteindre cet objectif:

  • Valeurs de l’entreprise

    La ferme urbaine de Delhaize un jour de mauvais temps

    La ferme urbaine de Delhaize un jour de mauvais temps

    Les détaillants peuvent essayer de communiquer avec leurs clients en élaborant des stratégies mettant l’accent sur des valeurs (responsabilité sociétale, environnementale) qui fassent écho à ceux des consommateurs. Un exemple récent intéressant est celui de Delhaize et sa ferme urbaine.


  • Expérience hors magasin

    Le positionnement du détaillant jouera un rôle dans la détermination de l’expérience proposée. Les retailers plus premium s’engageront certainement dans une communication en faveur d’une alimentation plus saine et tenteront de rendre l’expérience d’achat plus en attirant les clients vers des produits nouveaux. Une plus grande maturité technologique des consommateurs pourrait également conduire les retailers à réitérer des expériences qui avaient échoué dans le passé (voir par exemple l’expérience Delhaize « The Cube » qui faisait écho à celle de Tesco en Corée du Sud).

  • Expérience en magasin

    La signalétique en magasin, les rayonnages intelligents, les méthodes de paiement plus rapides contribueront toutes à améliorer l’expérience client. La révolution viendra également de l’utilisation des applications mobiles. Très sous-estimées jusqu’à présent leur utilisation reste rare et se limite le plus souvent à des expérimentations (voir par exemple l’application de réalité augmentée lancée par Ahold aux Pays-Bas).



4. Le Big Data, source de « Big » espoirs de croissance

La collecte et l’utilisation des données est au cÅ“ur de la stratégie des retailers depuis des années. Les coupons personnalisés, par exemple, ont été créés à l’aide d’algorithmes complexes visant prédire ce que vous aimeriez acheter et vous inciter à le faire.
Une puissance de calcul bon marché disponible dans le Cloud va permettre d’exploiter encore plus les données collectées et de participer à de nouveaux développements. Le concept store Amazon Go lancé par Amazon à Seattle collecte et analyse ainsi un très large éventail de données jusqu’alors non capturées (émotions, séquences d’achat, position dans le magasin, …).

Étude de marché : les 5 tendances qui vont changer le futur du retail



5. Lier les analyses et la rentabilité du point de vente

Suivant le sillon tracé par la tendance précédente (Big Data), il semble évident que les retailers devront innover pour améliorer leur rentabilité (surtout dans un contexte de lutte acharnée entre le commerce électronique et les magasins physiques).
De nouvelles expériences de tarification dynamique en magasin seront certainement lancées en 2018. De nouveaux types de données seront sans doute également collectées (par exemple par le biais de méthodes de paiement instantanées) qui permettront aux retailers de visualiser les séquences d’achats en magasin et d’envisager d’optimiser les parcours client et de les rendre plus rentables.



Etudes de cas

 

Une communication décalée pour le Drugstore Parisien

Le Drugstore Parisien est le fruit d’une collaboration entre une marque et un distributeur : L’Oréal d’un côté et Casino de l’autre. Une communication décalée est privilégiée pour créer une expérience client différente. Cela vous rappellera certainement la communication de Monoprix il y a quelques années (2009).


Des robots qui vérifient les stocks et les prix chez WalMart

Voici un autre très bel exemple de la tendance 5. L’automatisation est de plus en plus utilisée pour accroître l’efficacité et la rentabilité dans le secteur du retail. Cette photo montre un robot dans un magasin WalMart qui vérifie l’exactitude des prix et le niveau des stocks en balayant continuellement les différentes allées du magasin.


Colruyt utilise l’intelligence artificielle pour faciliter le passage en caisse

Voici un très bon exemple de la façon dont les retailers peuvent utiliser l’intelligence artificielle (la reconnaissance d’objets dans ce cas) pour accélerer le passage en caisse. Olivier Delangre, le PDG d’Amoobi, a posté la photo suivante après une visite dans un magasin Colruyt à Courtrai (partie occidentale de la Belgique). Dans un post sur Linkedin il écrit :

« Colruyt a récemment installé des caméras intelligentes à la caisse de son magasin de Courtrai. Ces caméras intelligentes reconnaissent automatiquement les fruits et les légumes et permettent d’accélérer le passage en caisse. Il s’avère que c’est aussi un excellent moyen de comprendre l’interaction entre la technologie et l’expérience du client. J’ai pris des pommes et décidé de faire le test moi-même. Devant moi se trouvait une clientèle régulière de plus de 60 ans. Elle mit ses raisins dans la balance, ouvrit le sac et commença à scanner ses produits toute seule. Malheureusement, cela ne fonctionna pas malgré l’aide de la caissière. Cette dernière pesa les raisins en suivant la procédure standard. Quand vint mon tour, je voulus scanner mes pommes, mais la caissière me demanda de le mettre sur la balance normale « pour faciliter les choses ».

Je crois vraiment en la technologie. Cette histoire nous rappelle qu’elle doit être perçue comme apportant une valeur ajoutée [pour être adoptée]. »

Deux zones de caisses chez Waitrose à Londres

Les consommateurs veulent être plus efficaces lorsqu’ils font leurs achats. Ils veulent passer moins de temps dans le magasin. Les systèmes de type self scan sont désormais en place dans la plupart des supermarchés. Waitrose a été un peu plus loin en proposant une zone « Food to Go » à l’entrée avec une caisse de type selfscan dédiée. Cette zone est comme un magasin dans le magasin. Elle est située à l’entrée et loin du reste de la zone des caisses normale. Elle ne s’intègre donc pas dans le trajet « normal » à travers le magasin.

Ce faisant Waitrose reconnaît l’existence d’un nouveau type de consommation (achat d’un produit à l’heure du déjeuner) et facilite l’expérience client. Photo reproduite avec l’aimable autorisation d’Olivier Delangre (Amoobi).


Crédits photos : Shutterstock



Publié dans Innovation, Marketing.

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