Le snowball effect est une méthode d’échantillonnage utilisée en recherche qualitative. Elle permet de faciliter le recrutement de répondants dans des contextes difficiles. L’échantillonnage réalisé grâce au snowball effect présente des avantages mais également des limitations que nous abordons dans cet article. Vous retrouvez également une définition exhaustive ainsi que des exemples concrets. Si vous souhaitez plus d’informations sur les études qualitatives que nous réalisons, n’hésitez pas à nous contacter.
Sommaire
Qu’est-ce que le snowball effect ?
Le snowball effect est une technique qui permet de recruter des répondants pour des focus groups ou des interviews individuelles. Il s’agit donc d’une méthode d’échantillonnage pour la recherche qualitative.
Le snowball effect consiste à demander à chaque personne contactée les coordonnées d’une ou plusieurs autres personnes à interroger. A chaque contact, la liste de répondants potentiels s’allonge à la manière d’une boule de neige qui grossit continuellement lorsqu’on la pousse. Cette étape peut être mise en œuvre directement lors du premier contact (avant l’interview donc) ou après que le répondant a été interrogé.
Le snowball effect est facile à mettre en œuvre ce qui explique son succès. C’est une alternative à des approches plus compliquées comme l’observation participative. L’anthropologue Teun Voeten a par exemple vécu avec des SDF pour les besoins de ses recherches.
On comprend donc aisément qu’il s’agit là d’une méthode d’échantillonnage non probabiliste. Le snowball effect ne permet en effet pas de construire des échantillons « représentatifs », même si la notion de représentativité en recherche qualitative n’a pas vraiment de sens (nous vous renvoyons à ce sujet à notre article sur la saturation ainsi qu’à notre calculateur de taille d’échantillon qualitatif).
Mise en œuvre
Si vous décidez de tirer profit du snowball effect, vous pouvez le mettre en œuvre de 2 façons :
- soit en demandant directement les coordonnées de personnes à contacter
- soit en demandant des contextes, des relais, des endroits par le biais desquels entrer en contact avec d’autres répondants
Pratiquement, voici quelques idées de questions à poser au moment où vous contactez des répondants potentiels ou à la fin de votre entretien qualitatif / focus group. Procédez comme suit.
1) Rappelez tout d’abord le contexte de votre étude
« Pour rappel, mon étude s’attache à étudier [description des objectifs]. Dans ce cadre j’aimerais interroger des personnes qui [description du profil du répondant idéal] »
2) Demandez les contacts d’autres répondants
« Sans doute connaissez-vous des personnes qui répondent à cette description. Vous pourriez vraiment m’aider en me mettant en contact avec elles »
3) Élargissez la demande si vous n’obtenez pas de réponse directement
« Peut-être pouvez-vous alors me donner quelques idées pour trouver de telles personnes. Pouvez-vous me donner les coordonnées de quelqu’un qui soit susceptible de connaître de telles personnes ? »
4) Faites réfléchir aux lieux ou aux manières d’entrer en contact
Pour autant que vous n’ayez pas déjà posé cette question durant l’entretien, faites réfléchir votre répondant aux endroits (physiques ou virtuels) où vous seriez susceptible de trouver d’autres répondants.
« Si vous deviez trouver des répondants, où iriez-vous les chercher ? »
Avantages du snowball effect
Le snowball effect présente plusieurs avantages que nous analysons dans ce paragraphe.
Facilité de mise en œuvre
Le recrutement de répondants en recherche qualitative est généralement une partie très complexe. C’est à ce stade que se joue la faisabilité même de l’étude. Pas de répondants = pas d’interviews ou de focus groups.
Le snowball effect est une approche à la portée de tous, facile à appliquer, pour augmenter la probabilité de réussite dans la phase de recrutement. C’est sans doute ce qui explique sa popularité.
La seule méthode applicable pour atteindre les populations « cachées »
Le snowball effect est souvent présenté comme la meilleure méthode d’échantillonnage pour les populations cachées. Une population est dite « cachée » lorsqu’elle est difficile d’accès, lorsque ses membres sont peu connectés aux autres communautés. Il s’agit donc typiquement de populations que l’on peut qualifier de marginalisées. Les exemples que nous citons à la fin de cet article de la mesure de cette marginalisation : drogués, sans domicile fixe, malades, chômeurs.
Les populations « cachées » ne se limitent toutefois pas à celles qui sont marginalisées au sens négatif du terme. A l’autre extrême du spectre, les plus riches par exemple vivent également cachés et sont difficiles d’accès (voir un exemple concret ici). Disposer d’une recommandation, d’un contact commun, est souvent indispensable pour les approcher. Le snowball effect est peut-être dans ce cas de figure l’unique moyen de constituer votre échantillon.
Comprendre la dynamique relationnelle au sein d’une population
Noy (2008) avance un autre avantage à l’issue de 2 études utilisant le snowball effect. La première consacrée aux routards, la seconde aux chauffeurs professionnels à Jérusalem. Dans les deux cas l’auteur s’est basé sur des interviews individuelles de 2 populations difficiles d’accès et a réfléchi à ce que le snowball effect lui apprenait sur les populations qu’il étudiait. Il écrit :
Alors que je cherchais d’abord des informations dans le matériel produit par les entretiens dans ces recherches (c’est-à-dire le » texte « ), j’ai ensuite réalisé que je pouvais en apprendre beaucoup sur les routards et les hommes marginalisés en réfléchissant à la dynamique permettant d’y avoir accès ou de les approcher. C’est cette idée, et les interrelations qui ont alors émergé entre les procédures d’échantillonnage et d’entretien dans ces projets, qui m’ont amené à réévaluer le rôle de l’échantillonnage via le snowball effect.
While I initially looked for information in the material produced in the interviews in these researches (i.e., the ‘text’), I later realized that I could learn a great deal about both backpackers and marginalized men by reflecting upon the dynamics of accessing or approaching them. It was this insight, and the interrelations that then emerged between the procedures of sampling and interviewing in these projects, that led me to re-evaluate the role of snowball sampling
Inconvénients du snowball effect
Avant d’utiliser la technique du snowball effect, il convient d’en comprendre les limites.
Biais de diversité
Le snowball effect étant une technique non probabiliste qui repose sur des relations existantes entre répondants, il peut en résulter un problème de diversité des opinions exprimées. L’adage populaire dit en effet « qui se ressemble s’assemble ». Cette proximité d’opinion des répondants s’observe sur le terrain.
En demandant à des répondants de vous renseigner des personnes à interroger, vous risquez donc de vous retrouver avec un échantillon qui exprime des opinions similaires. Ce manque de diversité constitue forcément un biais.
La conduite de l’entretien conditionne le résultat
La qualité des contacts renseignés par les personnes que vous aurez interrogées dépend de la relation que vous aurez réussi à tisser avec elles. En d’autres termes, si vous réussissez à établir une bonne relation avec votre répondant, l’entretien qualitatif se passera bien. Par ricochet vous aurez plus de chances de récupérer des contacts intéressants pour la suite de votre étude.
Le snowball effect, en tant que méthode d’échantillonnage, repose donc potentiellement en partie sur la qualité de la relation humaine que vous serez parvenu à bâtir.
Perte de contrôle
Contrairement aux autres méthodes d’échantillonnage, le snowball effect conduit à une perte de contrôle pour celui qui réalise la recherche qualitative. En effet, l’effort du recrutement est « déplacé » sur les répondants. Pour rendre compte de cette perte de contrôle, il est utile de garder une trace écrite et/ou visuelle du processus de recrutement (voir graphique ci-dessus).
Exemples d’utilisation du snowball effect en recherche qualitative
Voici quelques exemples de mise en pratique du snowball effect en recherche qualitative. Nous commençons par vous donner quelques cas que nous avons traités au sein de notre agence d’étude de marché, puis continuons avec des exemples issus de la littérature académique.
Étude sur les clients des banques privées
Les clients des banques privées doivent justifier d’un patrimoine minimum et d’encours importants. Leur niveau de richesse en fait donc une population limitée en taille. Ces clients ont également tendance à être très discrets ce qui complique leur approche.
L’étude que nous avons menée pour une grande banque luxembourgeoise s’est donc appuyée sur le snowball effect afin de recueillir des recommandations pour approcher les répondants.
Étude sur les déficients visuels
Nous avons mené plusieurs études sur les besoins des personnes déficientes visuelles. Cette population souffre d’un manque d’intégration au sein de la société en général et du monde du travail en particulier (voir à ce sujet notre rapport pour le Parlement sur l’emploi des personnes handicapées dans les administrations).
Afin d’approcher ces populations, nous nous sommes notamment appuyés sur les administrateurs de forums spécialisés en ligne pour obtenir les contacts de répondants potentiels.
Études académiques
Les exemples de recherches académiques utilisant le snowball effect sont légion :
- consommateurs de drogues : Heckathorn (1997), Sifaneck & Neaigus (2001)
- chômeurs : Atkinson & Flint (2001), Faugier & Sargeant (1997)
- malades du SIDA : Sifaneck & Neaigus (2001)
- personnes âgées : Warren & Levy (1991)
Conclusion
La méthode d’échantillonnage s’appuyant sur le snowball effect est un classique en recherche qualitative. Elle est particulièrement adaptée pour la réalisation d’entretiens qualitatifs avec des populations cachées. Sa facilité de mise en œuvre ne doit toutefois pas faire oublier ses limitations. Le snowball effect peut en effet conduire à des biais de sélection et à une moins grande diversité des opinions recueillies.
Publié dans Recherche.