13 juin 2012 657 mots, 3 min. de lecture

Innovation et expérience client dans les boutiques de luxe

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Nous avons récemment conduit une analyse qualitative de différents magasins de luxe et en avons analysé l’expérience client. Bien que les résultats ne puissent être divulgués publiquement nous avons été déçus en règle générale de l’expérience client et de la […]

Nous avons récemment conduit une analyse qualitative de différents magasins de luxe et en avons analysé l’expérience client. Bien que les résultats ne puissent être divulgués publiquement nous avons été déçus en règle générale de l’expérience client et de la qualité de service proposée par les marques les plus connues.

Vendeurs manquant de « feeling », parfois antipathiques et ne montrant aucun intérêt pour le client (spécialement à l’heure de midi lorsque la pause approche et que le client devient gênant), manque de connaissance des produits, remarques désobligeantes d’autres vendeurs à l’égard de personnes regardant la vitrine ou s’apprêtant à entrer dans le magasin, niveau de langage inadapté, … faites votre choix, les exemples ne manquent pas. Malgré une impression générale très décevante deux marques ont réussi à tirer leur épingle du jeu.

L’une d’elles est Glashütte, une marque allemande de montres (propriété du groupe Swatch) qui a récemment ouvert une boutique assez exigüe sur le Faubourg Saint-Honoré.

L’expérience interactive qui y est proposée compense pour le manque de place. Deux énormes écran plasma plaqués contre le mur permettent au vendeur de plonger le client au cœur de l’histoire de la marque. Une tablette tactile, cachée dans le panneau coulissant d’un meuble bas au sein d’un espace « lounge », permet de vous faire naviguer, en fonction de vos questions, d’une étape technique (le bleuissement des vis par exemple), à un détail historique sans jamais perdre le contact avec l’objet de vos désir placé sur la console en face de vous.

Crédits photo : Swatch group / Glashütte

L’espace lounge est également intéressant car il rompt avec les traditions du secteur et permet d’instaurer un contact plus intime mais néanmoins distant (grâce à la console) entre le vendeur et vous. C’est sur cette console que vous sera servi un café accompagné, comble du détail, d’un chocolat à l’effigie de la marque. C’est la première fois que je voyais un tel niveau de détail.

 

Mon avis :

C’est dans les détails que se cache le diable dit-on en Allemagne et la boutique Glashütte donne une bonne idée du niveau de perfection qu’il est possible d’atteindre.

L’intégration de technologies multimédia dans un tel environnement n’est pas anodin et mérite d’être souligné. Je me souviens d’une étude présentée à la conférence International Marketing Trends à Venise en Janvier 2012 qui montrait, au travers d’une approche ethnographique, que les boutiques de luxe constituaient un microcosme isolé –volontairement- de l’extérieur où s’appliquaient des règles de courtoisie, de langage, un peu désuètes et à l’opposé de la rudesse du monde extérieur. En introduisant le multimédia dans un tel environnement c’est une partie de la rigidité qui s’efface en même temps qu’y pénètre un peu du monde extérieur. Est-ce toutefois une bonne chose ? Les codes séculaires prévalent et être trop innovant risque d’enlever à l’univers du luxe une partie du caractère « sacré », rituel et quasi processionnel que les acheteurs viennent, consciemment ou inconsciemment, y chercher. L’innovation technologique dans le luxe se doit donc de rester en phase avec le positionnement de la marque. Si une marque sportive peut se permettre une plus grande liberté, les marques classiques ont pour obligation de ne pas faire sortir leurs clients de leur zone de confort. L’innovation se doit donc d’y être plus incrémentale que disruptive.



Publié dans Marketing, Recherche.

Donnez votre avis

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *