12 novembre 2013 801 mots, 4 min. de lecture

Les consommateurs en ont-ils assez du low-cost ?

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Quelque chose d’étrange se passe actuellement sur le marché low-cost. Il y a comme une déferlante arrivant droit dans notre direction et dont les premiers signes avant-coureurs commencent à être perçus. Les campings, Ryanair et les supermarchés connaissent tous le […]

Quelque chose d’étrange se passe actuellement sur le marché low-cost. Il y a comme une déferlante arrivant droit dans notre direction et dont les premiers signes avant-coureurs commencent à être perçus.

Les campings, Ryanair et les supermarchés connaissent tous le même retournement de situation

Tout a commencé avec les sites de camping il y a quelques mois. En analysant le chiffre d’affaire des camping privés, je me suis rendu compte que les sites 5 étoiles (le plus haut niveau de qualité) étaient en plein essor tandis que les sites 1 étoile étaient en déclin. Sans surprise également, les sites « coincés au milieu» ont également été en chute libre , comme de nombreuses entreprises de taille moyenne dans divers secteurs expérience . Pourtant, on peut avoir prévu que les offres à bas coût serait intéressant en ces temps de crise. En fait, ils ne sont plus .

La même chose s’applique aux supermarchés « hard discount » ( Lidl, Aldi et leurs semblables). En 2009, il était prévu par les spécialistes du secteur que les hard discounters finiraient par représenter 25% de part de marché (ils représentaient 15% en 2009). Malgré une loi adoptée en France et autorisant l’ouverture de surfaces commerciales de moins de 1000m² sans autorisation administrative préalable, les supermarchés low-cost n’ont cessé de perdre des parts de marché depuis 2009. Ils sont passés de 15 % à 12,4% en 4 ans et apparemment la baisse s’accélère encore. Rien que sur le deuxième trimestre de 2013 la perte est de 1,4%.

Les ouvertures de magasins ouvertures se font également de plus en plus rares (Lidl a réduit ses ouvertures de 75%) et dans l’ensemble les hard discounters ont perdu 700000 clients sur le territoire français.

Last but not least Ryanair, le chantre du low-cost, a émis un avertissement sur les bénéfices pour la première fois de son histoire. La compagnie irlandaise est en train de perdre des clients et les actionnaires sont tellement inquiets que des modifications en apparence anodines mais révélant un malaise profond ont été annoncées: réduction du prix pour l’impression de dernière minute de la carte d’embarquement, l’autorisation d’avoir un deuxième petit sac (un sac à main en gros) à bord sans coût supplémentaire, la fin du siège non numéroté (et donc de la cohue à l’embarquement pour avoir les meilleures place). Ryanair se rapproche à nouveau d’un modèle civilisé

Mais que se passe-t-il donc ?

Tout d’abord nous assistons à une polarisation accrue du marché . Toutefois cette polarisation est de nature légèrement différente de celle que nous observions il y a quelques mois / années.

Auparavant les offres de moyen de gamme se retrouvaient coincées entre low-cost et premium et avaient le plus grand mal à tirer leur épingle du jeu. Le marché était alors divisé en 3 parties: low-cost (croissance positive), moyen de gamme (au mieux en stagnation), et premium (en grande forme) .

Il semble maintenant que le segment low-cost et le niveau intermédiaire aient fusionné en ce qui concerne les perspectives de croissance. Le marché se divise dès lors en deux « segments » : un qui décline et l’autre qui croît.

Comment expliquer ces changements sur le marché ?

Je n’ai pas une boule de cristal et l’explication que je m’apprête à donner est donc purement personnelle.

En temps de crise les consommateurs trouvent de nombreuses justifications pour se serrer la ceinture, renier sur le superflu et donner la priorité aux aspects pécuniaires. Seulement l’acte de consommer est intrinsèquement liée au plaisir et restreindre ce plaisir trop longtemps ne peut qu’amener des frustrations à long terme. L’être humain n’existe que par la jouissance qu’il peut retirer de la vie et les plaisirs qui ponctuent son existence sont dès lors indispensables. La recherche permanente d’une justification rationnelle à l’acte de consommation entretient l’ambivalence de l’être humain et je pense que c’est justement dans cette recherche de justification qu’il faut chercher l’explication au déclin des entreprises low-cost ci-dessus. La composante service y étant importante et l’expérience client en résultant pauvre, la recherche du plaisir reprend le dessus à la faveur de l’amélioration des conditions économiques. La bonne nouvelle est donc peut-être que ce déclin du low-cost traduit la perception d’un environnement économique meilleur et influencera positivement le moral des ménages (moteur de la consommation). Car quand on y réfléchit bien, rien n’est pire pour le moral que la frustration de ne pouvoir consommer.



Publié dans Marketing.

Donnez votre avis

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *