Le principe du «Payez ce que vous voulez» (Pay-What-You-Want en anglais) permet aux clients de (re)prendre le contrôle sur les prix payés. Cette technique est assez ancienne et une recherche scientifique datant de 2009 avait montré les avantages de cette approche de pricing. Quelques exemples concrets ont pu être relevés ici et là, mais cette stratégie marketing est restée rare. Les entreprises demeurent en effet réticentes à laisser les clients décider du pricing et craignent que cette liberté soit utilisée à mauvais escient par les clients (c’est-à-dire pour léser les entreprises).
C’est dans ce contexte que nous nous sommes intéressés à l’initiative de Garçonne et Chérubin, un e-commerçant français spécialisé dans les chaussures. Lors de ses soldes d’hiver, Garçonne et Chérubin a décidé d’appliquer le système du Pay-What-You-Want (PWYW), légèrement adapté pour en minimiser les risques.
Comment fonctionne le Pay-What-You-Want chez Garçonne et Chérubin
Garçonne et Chérubin ont adapté le dispositif PWYW classique pour en limiter les risques financiers. Le client propose un prix qu’il est prêt à payer et s’engage à payer ce prix si son offre est acceptée. Les offres sont revues à la fin de la période des soldes d’hiver et les clients sont informés de la décision d’accepter ou non l’offre. En un sens, ce mécanisme ressemble à une offre conditionnelle d’achat sur laquelle le vendeur à la main. Il limite les risques de vendre en-dessous du prix de revient tout en donnant au vendeur la possibilité de maximiser sa marge sur la base des offres reçues.
Les limites de la stratégie de pricing Pay-What-You-Want
La stratégie PWYW a 3 limites :
- Limites culturelles: le PWYW ne peut être appliqué dans tous les pays. Par exemple, le PWYW serait certainement mal utilisé aux Pays-Bas. Dans ce pays, où les consommateurs sont extrêmement sensibles aux prix et réputés pour leur propension à épargner, les offres de type « satisfait ou 100% remboursé » ne sont pas d’application de peur qu’elles soient dévoyées.
- le PWYW fonctionne mieux dans les environnement offline où le client est en contact direct, physique, avec le vendeur. Ne pas pouvoir se cacher derrière un écran ajoute une pression sociale qui rend moins probable l’utilisation abusive du PWYW. Imaginez-vous par exemple payer 1 € à un restaurateur après avoir profité d’un dîner gastronomique à deux ? Personne n’oserait agir de la sorte car cela serait socialement inacceptable.
- Les effets sur la fidélisation des projets PWYW les plus alléchants méritent d’être remis en question. L’expérience PWYW lancée par Brandalley en 2009 a conduit 85% des clients à payer 1 €, c’est-à-dire le minimum. Le recrutement de nouveaux clients a été massif pour Brandalley (40000); Mais les effets sur la fidélité à long terme sont encore à démontrer. Combien de ces clients sont-ils restés fidèles et ont racheté par la suite ?
Conclusion
La stratégie de pricing Pay-What-You-Want (PWYW) n’est pas nouvelle. Il a été utilisé avec parcimonie depuis de nombreuses années et reste somme toute rare. Les stratégies PWYW en ligne présentent le risque d’attirer des clients qui ne seront pas fidélisables et ne seront donc pas rentables sur le long terme. Lorsqu’elle est appliquée à un contexte offline, une stratégie PWYW peut donner de meilleurs résultats parce que les clients seront moins susceptibles d’abuser du système et seront socialement poussés à payer un prix raisonnable.
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Publié dans Marketing.