Etudes qualitatives : les questions ouvertes et fermées

Etudes qualitatives : les questions ouvertes et fermées

Quelle sont les différences entre questions ouvertes et  questions fermées ? Quand utiliser les unes, et quand privilégier les autres ? Comment s’intègrent-elles au sein des méthodes de recherches qualitatives et notamment aux entretiens ?

Kathryn J. Roulston nous dévoile ses définitions d’une question fermée et ouverte dans le cadre d’entretiens qualitatifs dans l’Encyclopédie SAGE sur les méthodes de recherches qualitatives. Si vous souhaitez mieux comprendre comment les méthodes qualitatives s’inscrivent dans l’élaboration d’une étude de marché, nous vous invitons à lire notre guide sur les études de marché. Vous pouvez le télécharger gratuitement dans notre section reprenant nos livres blancs (nous ne vous demandons aucune information personnelle).


Sommaire


Introduction

Commençons par indiquer que les questions ouvertes et les questions fermées n’ont au premier abord pas les mêmes finalités dans le cadre d’une étude de marché. Les questions ouvertes sont plutôt utilisées en recherche qualitative (voir la vidéo ci-dessus pour plus d’informations), celles fermés en recherche quantitative. Mais ce n’est pas une règle absolue.

Dans cet article vous découvrirez donc les définitions des questions fermées et des questions ouvertes. Nous vous expliquons aussi dans quel contexte les utiliser. Pour finir vous trouverez des exemples de reformulation de questions fermées en questions ouvertes dans le cas :

Questions ouvertes et fermées : l’essentiel à retenir

Les questions ouvertes :

  • destinées aux études qualitatives (interviews et focus group)
  • très efficaces pour comprendre en détails le répondant et sa position par rapport à une thématique / situation définie
  • particulièrement utiles pour dévoiler de nouveaux aspects, sous-thématiques, problématiques, etc. méconnues ou non-identifiées

Les questions fermées :

  • destinées aux études quantitatives (questionnaires et sondages)
  • adaptée à un usage sur un large panel de répondants
  • permettent une analyse standardisée des données
  • ont pour but de valider les hypothèses (préalablement énoncées dans la partie qualitative)

Questions fermées

Une question fermée offre, comme son nom l’indique, un nombre limité de réponses. Le répondant pourra par exemple choisir une réponse parmi un panel de propositions données ou encore un simple « oui » ou « non ». Elles ont pour but de dégager une réponse précise, clairement identifiable et aisée à classer.

Ce type de question est notamment utilisé lors d’interviews ayant pour but d’être encodées suivant des critères préétablis. Aucune place n’est laissée à l’expression libre, comme c’est le cas pour les questions ouvertes. Souvent, ce type de question est intégré dans des guides d’entretiens 1-to-1 et des focus groups et permet à l’interviewer de récolter la même information d’un large éventail de répondants, et ce sous le même format. En effet, les questions fermées sont pensées et orientées afin de suivre un schéma et un cadre prédéfini par l’interviewer.

crédits : Shutterstock

Deux formes de questions fermées ont été identifiées par les chercheurs : les questions fermées explicites, où les répondants se voient proposer des réponses au choix, et les questions fermées implicites, qui incluent des suppositions quant aux réponses pouvant être formulées par les répondants.

Une question fermée explicite serait par exemple formulée ainsi : « combien de fois par semaine mangez-vous des pâtes : jamais, 1 à 2 fois par semaine, 3 à 4 fois, 5 fois par semaine ou plus ? » La version adaptée sous la forme d’une question fermée implicite serait formulée comme suit : « combien de fois par semaine mangez-vous des pâtes ? ». L’interviewer suppose alors que les réponses seront données en chiffres.

Le Net Promoter Score (ou NPS) est un exemple de question fermée (voir exemple ci-dessus)

Alors que certains chercheurs considèrent l’utilisation de questions fermées comme étant restrictives, d’autres voient en ces questions – associées à des questions ouvertes – la possibilité de générer différentes données propices à analyse. La façon dont ces questions fermées peuvent être utilisées, formulées, séquencées, et introduites lors d’entretiens, dépend considérablement des études et recherches menées en amont.

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Dans quel contexte utilise-t-on les questions fermées ?

  • Les études quantitatives (tests, validation de l’étude qualitative, etc.)
  • Les études auprès d’un large panel de répondants (> 100 personnes)
  • Les études récurrentes dont les résultats doivent être comparés
  • Lorsque vous avez besoin d’une confirmation et que les réponses possibles sont limitées de fait

Questions ouvertes

Une question ouverte est une question laissant au répondant le loisir de s’exprimer librement sur un sujet donné. Ce type de question est, par opposition aux questions fermées, non directif et permet aux répondants d’utiliser leurs propres termes et d’orienter leur réponse à leur convenance.

Les questions ouvertes, et donc sans présomptions, peuvent être utilisées dans le but de voir quel aspect se détache des réponses, et ainsi pourraient être interprétées comme un fait, un comportement, une réaction, etc., communes à un certain panel de répondants.

Par exemple, nous pouvons très facilement imaginer des questions ouvertes telles que « décrivez votre routine matinale ». Les répondants sont alors libres de décrire leur routine avec leurs propres mots, ce qui est un point important à prendre en compte. En effet, le vocabulaire utilisé est également propice à analyse et sera un élément à prendre en compte dans l’adaptation d’un guide d’entretien par exemple, et/ou lors de l’élaboration d’un questionnaire quantitatif.

crédits : Shutterstock

Comme nous vous le détaillons notamment dans notre white-paper sur l’étude de marché, une des recommandations à suivre, lors de l’utilisation de questions ouvertes, est de commencer par poser les questions plus générales pour finir par les questions allant plus dans le détail. Par exemple, après avoir décrit une journée type, l’interviewer pourra demander des précisions sur un des aspects évoqués par le répondant. De plus, les questions ouvertes peuvent également être orientées afin que l’interviewé évoque son ressenti face à une situation qu’il ou elle aurait évoquée précédemment.

Dans quel contexte utilise-t-on les questions ouvertes ?

  • Principalement lors d’études qualitatives (interviews et focus group)
  • Pour recruter les participants à une étude
  • Lors d’études visant à tester un design, un proof-of-concept, un prototype, etc.
  • Analyse des consommateurs et des comportements d’achat
  • Etude de satisfaction, de notoriété, de l’expérience client, de fidélisation, etc.
  • Afin de préciser les hypothèses qui permettront de rédiger le questionnaire quantitatif et de proposer une série de réponses pertinentes (à des questions fermées).

Il est essentiel pour l’interviewer de donner aux répondants un cadre lors de l’utilisation de questions ouvertes. Sans ce contexte, les interviewés pourraient se retrouver perdus face au large éventail de réponses possibles et cela pourrait nuire au bon déroulement de l’entretien. Un autre point critique concernant ce type de questions réside dans l’aspect analytique qui s’ensuit. En effet, les répondants étant libres de formuler leurs réponses, les données récoltées seront moins faciles à classifier selon des critères fixes.

L’utilisation des questions ouvertes dans les questionnaires quantitatifs

Les règles sont faites pour ne pas être respectées, c’est bien connu. La plupart des questionnaires quantitatifs contiennent donc des champs libres dans lesquels le répondant est invité à exprimer ses opinions de manière plus « libre ». Mais comment interpréter ces réponses ?

Lorsque la quantité de réponses collectées est faible (quelque dizaine) il sera aisé de procéder de manière manuelle, éventuellement en réalisant un codage (pour plus d’informations sur la technique du codage, rendez-vous ici). Vous dégagerez ainsi rapidement les grandes tendances, les thématiques récurrentes.

Par contre si vous récoltez des centaines, voire des milliers de réponses, l’analyse de ces réponses libres va s’avérer beaucoup plus fastidieuse. Comment faire ? Dans ce cas nous vous conseillons d’utiliser un outil d’analyse sémantique. Il s’agit le plus souvent d’une solution online, spécifique à une langue, qui se base sur un algorithme de NLP (Natural Language Processing). Cet algorithme va, très rapidement, analyser votre corpus et faire ressortir les thématiques récurrentes. Il ne s’agit pas ici de calculer des fréquences de mots, mais bien de travailler sur la sémantique afin d’analyse la fréquence d’un thème.

Bien entendu, l’utilisation de questions ouvertes lors d’entretiens n’exclut pas l’utilisation de questions fermées. Le fait d’alterner ces deux types de questions lors d’entretiens, que ce soient des interviews en 1-to-1, des conversations en groupes ou des focus groups, est propice, non seulement à conserver une certaine dynamique durant l’entretien, mais également à pouvoir cadrer certaines réponses tout en laissant certains champs d’expressions libres. De manière générale, il est intéressant pour les différentes parties que l’interview se termine par une question ouverte où l’interviewer demande à l’interviewé si ce dernier a quelque chose à ajouter ou s’il ou elle a des questions.

 

Exemples de questions fermées et ouvertes pour une étude de satisfaction

Question fermée Question ouverte (reformulation) Remarques et commentaires
Êtes-vous satisfait ? Comment décririez-vous votre satisfaction par rapport à ce produit ? La nouvelle formulation force le répondant à réfléchir à sa satisfaction et à verbaliser cette dernière.
Êtes-vous satisfait ? Quels sont les aspects de ce produit qui affectent le plus votre satisfaction ? la reformulation en question ouverte permet aux répondants de s’attarder sur des aspects particulier du produit, des fonctionnalités et de s’interroger. Cette question est particulièrement utile dans une démarche d’amélioration produit.
Aimez-vous cela ?

Si vous en aviez la possibilité, qu’aimeriez-vous changer le plus ?

Qu’est-ce que vous ne changeriez sous aucun prétexte sur ce produit ?

Il s’agit ici d’une reformulation assez similaire à la précédente. La question ouverte permet de mettre certains points positifs ou négatifs en exergue. L’avantage de ces reformulations est également que vous allez pouvoir comprendre l’adéquation / inadéquation du produit par rapport à des habitudes de vie ou de consommation. Cela peut être très utile dans une démarche d’amélioration.
Les performances du produit étaient-elles à la hauteur de vos attentes ? A quoi vous attendiez-vous quand vous … La reformulation en question ouverte donne ici la possibilité de comprendre la formation des attentes (et les frustrations éventuelles qui conduisent à la formation de ces attentes). En théorie de la satisfaction client il est important de comprendre le niveau des attentes et de faire en sorte de les dépasser.

 

Exemples de questions fermées et ouvertes pour une étude d’innovation

Dans ce type d’étude vous confrontez le répondant à un produit ou à un service nouveau, innovant. Il est donc important de ne pas récolter des opinions superficielles mais de comprendre en profondeur l’attitude du répondant par rapport à l’objet de l’étude de marché.

Question fermée Question ouverte (reformulation) Remarques et commentaires
Pensez-vous utiliser ce produit ?

Comment pensez-vous que ce produit pourrait vous aider ?

Pouvez-vous décrire l’utilisation que vous feriez de ce produit ?

Cette question est particulièrement critique dans le cas d’une démarche d’innovation. Rappelez-vous que les éléments déclaratifs sont peu fiables. Il faut donc adopter une approche ethnographique pour obliger le répondant à réfléchir sur l’utilisation qu’il pourrait faire d’un nouveau produit, sur la manière dont ce dernier pourrait s’intégrer dans sa routine quotidienne.
Est-ce facile à utiliser ? Que trouvez-vous le plus embêtant en ce qui concerne l’utilisation de ce produit ? La question ouverte force le répondant à trouver des défauts au produit. Ces défauts qui seront énoncés seront autant d’opportunités pour l’interviewer d’approfondir les problèmes, et de comprendre leur origine.
Aimez-vous ce produit ?

Quelles sont les 3 fonctionnalités qui vous plaisent le plus dans ce produit ?

Quelles sont les 2 aspects de ce produit que vous trouvez les plus différentes d’un produit similaire ?

Dans ces questions ouvertes nous utilisons une technique de brainstorming qui force les répondants à trouver plusieurs arguments et épuise les réponses les plus courantes. Dans la seconde reformulation nous mettons également en avant des aspects différenciant. Connaître ces derniers peut être intéressant en termes de marketing et de communication.
Achèteriez-vous ce produit ?

Qu’est-ce qui vous inciterait à acheter ce produit ?

Quels sont les aspects de ce produit que vous trouvez les plus intéressants ?

Imaginez que vous puissiez tester ce produit. Sur quelle base jugeriez-vous qu’il vous le faut ?

Chacune des reformulations en question ouverte permet de mettre en avant les points différenciant du produit, ceux que le consommateur juge les plus intéressants. Utiliser une telle question ouverte peut se révéler intéressant pour comprendre quelles sont les aspects qui plaisent le plus et si ces derniers sont les mêmes quel que soit le segment de population. Il est tout à fait possible e effet qu’un segment de marché réagisse différemment aux arguments mis en avant (pensez par exemple à des segments d’âge). Savoir quels arguments mettre en avant en fonction de vos cibles peut donc se révéler être un atout considérable.

Quelques conseils pratiques

Comme vous l’aurez compris, les questions ouvertes sont particulièrement adaptées aux études qualitatives (entretiens 1-to-1 et focus group). Comment les formuler ?

Il s’agit d’utiliser la méthode de questionnement QQOQCCP (« Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Combien ? Pourquoi ?) avec rigueur et parcimonie :

  • « Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Combien ? » sont particulièrement efficaces pour l’étude qualitative et permettent de laisser votre interlocuteur développer et élaborer une réponse construite et pleine d’informations.
  • Utilisez la méthode CIT (Critical Incident Technique) avec des formulations poussant votre interlocuteur à aller dans le détail d’une expérience : « Pouvez-vous me décrire/raconter… ? », « Qu’avez-vous ressenti ? », « Selon vous… »
  • Evitez de demander « Pourquoi ? » : cette question peut pousser votre interlocuteur dans ses retranchements et ce dernier risque de chercher un raisonnement logique à sa réponse précédente. Ménagez vos répondants en leur demandant de vous en dire plus, de vous donner des exemples précis par exemple.

A l’inverse, les questions fermées sont principalement utilisées et adaptées aux questionnaires quantitatifs puisqu’elles permettent de faciliter l’analyse des résultats en cadrant les réponses des participants.

Image : Shutterstock


Publié dans Marketing.