17 janvier 2014 1107 mots, 5 min. de lecture Dernière mise à jour : 7 novembre 2023

Dave Carroll : interview du client insatisfait aux 12 millions de vues sur YouTube

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Dave Carroll est connu pour avoir lancé la première réclamation en vidéo qui ait connue un succès mondial. Sa célèbre vidéo « United breaks Guitars » l’a non seulement aidé à obtenir réparation mais le professionnalisme avec laquelle elle a été réalisée […]

Dave Carroll est connu pour avoir lancé la première réclamation en vidéo qui ait connue un succès mondial. Sa célèbre vidéo « United breaks Guitars » l’a non seulement aidé à obtenir réparation mais le professionnalisme avec laquelle elle a été réalisée lui a aussi permis d’atteindre plus de 12 millions de vues sur YouTube. Ce succès a donné la force à d’autres consommateurs insatisfaits de se plaindre également afin de trouver une solution ou, plus trivialement, pour obtenir tout simplement une réponse.

L’histoire de Dave est tellement unique qu’elle a même sa propre page Wikipedia.

Nous avons traité toute cette semaine des réclamations et du comportement consommateur à leur origine ; l’exemple de Kenny Martineau nous a aidé à comprendre les éléments déclencheurs de ce comportement et combien il est lié à la satisfaction du client.

Nous sommes extrêmement ravis de clôturer la semaine avec une interview de Dave Carroll où il nous donne ses impressions sur l’histoire de Kenny mais aussi sur la triade satisfaction de la clientèle / fidélité / plaintes et reviens sur son rôle de leader pour des milliers de clients insatisfaits.

IntoTheMinds : Dans le monde actuel où les entreprises prétendent entretenir des relations personnalisées avec leurs clients, que vous inspire l’histoire de Kenny Martineau ? Quels parallèles faites-vous avec votre propre histoire ?

Dave Carroll : Beaucoup d’entreprises comprennent l’importance d’entretenir des relations avec leurs clients et il s’agit d’une inflexion positive à l’heure actuelle. Ecouter ses clients et leur répondre est essentiel de nos jours. Des milliards de personnes utilisent les médias sociaux pour communiquer leur état d’esprit avec le reste du monde. Il est non seulement moins cher de garder un client que d’en trouver un nouveau, mais résoudre une réclamation peut aussi résulter dans un comportement de soutien à la marque [« évangélisme » NDT]. Dans mon cas United n’a pas montré d’intérêt à solutionner ce que je pensais être un problème sérieux et a été aussi surpris que moi par le succès de mes vidéos. Le monde a beaucoup changé en 4 ans.

ITM : Comment vous sentiez-vous d’un point de vue émotionnel en 2009 lorsque vous avez pris la décision de tourner votre désormais fameuse vidéo ?

DC : Je me sentais extrêmement frustré jusqu’au moment où j’ai pris la décision de réaliser la série de 3 vidéos qui est aujourd’hui sur YouTube. Après m’être fixé comme but d’utiliser mes talents musicaux pour partager mon histoire je me suis senti investi d’une énergie qui m’a permis de sortir de ma frustration et de m’échapper du « labyrinthe du service client ». Ainsi quand arriva l’heure de faire la première vidéo 6 mois plus tard j’étais dans un état d’esprit très positif et je n’ai eu qu’à me concentrer sur mon plaisir et la nécessité de produire un contenu de qualité.

ITM : Ne s’agit-il pas d’une injustice de devoir être talentueux (comme Kenny ou vous) pour pouvoir faire entendre sa voix et obtenir réparation ?

DC : J’ai connu un succès considérable dans un domaine qui correspond à ma passion et à mon expérience. Ce que je dis aux gens c’est que nous avons tous des forces et des passions que nous pouvons utiliser pour faire entendre notre voix en les combinant à la force des médias sociaux. Quelle est l’activité que vous aimez le plus, celle avec laquelle le temps passe le plus vite et qui ne vous donne jamais l’impression de travailler ? C’est celle-là que vous devriez utiliser pour faire passer votre message.

Ceci étant dit, mes partenaires et moi-même avons créé Gripevine.com pour aider les consommateurs à amplifier leur voix partout où ils sont convaincus de ne pas pouvoir être entendus. Cette plateforme a pour ambition de résoudre rapidement l’objet des réclamations en étant transparente, facile à utiliser et en invitant les entreprises concernées à répondre. Les consommateurs peuvent partager leurs griefs, évaluer et donner leur avis sur les entreprises et partager le tout en utilisant les médias sociaux. C’est « thérapeutique », efficace, et c’est pourquoi je ne pense pas que les consommateurs soient démunis de moyens de pression de nos jours. Nous avons le choix des armes.

ITM : Avez-vous connu d’autres situations qui vous ont insatisfaites et vous ont donné envie de publier une nouvelle vidéo sur YouTube ?

DC : J’ai été prudent dans mes tentatives de dupliquer ce que j’avais fait avec United Breaks Guitars, mais pour être honnête j’ai plutôt bien réussi à me faire entendre lorsque j’étais insatisfait. Parfois cela était du au fait que l’entreprise connaissait ma vidéo mais dans de nombreux cas c’était simplement parce que la société était efficace et à l’écoute.

Il y a cependant eu un cas il y a environ 2 ans où j’ai découvert, sans ambiguïté, qu’American Airlines utilisait ma vidéo sans mon autorisation lors de son programme de formation dans leurs locaux de New-York. Ceci nécessitait une permission qu’ils ne possédaient pas et pour laquelle ils n’avaient bien entendu pas payé. J’ai demandé à leur management 75000 miles gratuits au profit de l’association caritative « Children’s Wish Foundation » en échange de la permission d’utiliser ma vidéo. L’accord prévoyait que cette rétribution était la seule contrepartie et qu’aucune autre contribution ne serait demandée dans le futur. Ils refusèrent de signer et engagèrent un avocat pour officiellement réfuter l’utilisation de ma vidéo et me menacer de poursuites. Ils sont passés à cette époque tout près d’une autre vidéo à leur gloire ou d’une réponse en règle sur les médias sociaux. Là où American Airlines a vu une « confrontation » d’autres entreprises voient une « opportunité ». Leur réaction a été tellement insatisfaisante que j’ai décidé de ne plus voyager avec eux. Plus jamais. Par contre, comble de l’ironie, je continue à voyager sur United.



Publié dans Marketing.

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