La nomination de Linda Yaccarino à la tête de Twitter marque un tournant qui est symboliquement acté par le changement de nom du réseau social (X). La priorité de la nouvelle CEO sera de redonner confiance aux annonceurs. Ils sont 63,5% à avoir délaissé Twitter dont les revenus ont baissé de 80% en France.
Que va-t-il rester de Twitter à terme ? Beaucoup l’avaient donné pour mort et au final, il est toujours là. Son nouveau nom a déclenché des joutes verbales passionnées. Certains ont menacé de le quitter pour de bon, mais le nombre d’utilisateurs actifs mensuels n’a jamais été aussi élevé (237 millions). Et si la recette de Musk n’était tout simplement que de faire parler de son réseau social à tout prix ?
8 chiffres qui illustrent les déboires (et les réussites) du nouveau Twitter
- 62,5% des 1000 plus gros clients de Twitter n’y font plus de publicité
- -80% : la chute des revenus publicitaires de Twitter en France
- 82,6% des employés ont été licenciés : Twitter est passé de 7500 à 1300 employés
- -55% : la valorisation de Twitter serait passée de 44 milliards de dollars à 20 milliards. C’est Elon Musk lui-même qui le dit.
- 640000 personnes ont souscrit à l’offre premium à 8$/mois. C’est un échec.
- 1 million d’abonnés seulement ont quitté Twitter pour Mastodon. Une goutte d’eau.
- 50000 abonnés seulement sont partis vers Bluesky
- 237 millions d’utilisateurs actifs mensuels
Il est un fait qu’Elon Musk a un don rare : celui de faire parler de lui autant en bien qu’en mal. Celui à qui tout semble sourire à la tête de Tesla, a multiplié les déclarations fracassantes et les gaffes à la tête de Twitter. Sa reprise de l’oiseau bleu est arrivée au plus mauvais moment, celui où les vannes de l’argent magique (« helicopter money ») se fermaient. Désormais les investisseurs attendent des entreprises technologiques des preuves tangibles de rentabilité. Leur patience pour obtenir des résultats positifs s’est réduite drastiquement. Et bien que Twitter ne soit désormais plus cotée à la bourse de New-York, il n’en reste pas moins que les co-investisseurs d’Elon Musk (les banques !) demandent des comptes. Cela explique sans doute que le fantasque Sud-Africain ait pris la décision de nommer Linda Yaccarino à la tête de ce qui s’appelle désormais « X ».
Le défi n°1 de Linda Yaccarino : redonner confiance aux annonceurs
Le défi principal de Linda Yaccarino sera de redonner confiance aux annonceurs. C’est LA priorité de la nouvelle CEO tout simplement parce que c’est l’unique vraie source de revenus pour Twitter / X. Pour donner une idée du défi qui l’attend, deux chiffres suffisent :
- 625 des 1000 plus gros annonceurs ont retiré leurs budgets publicitaires de Twitter.
- En France les revenus publicitaires de Twitter se seraient effondrés de 80%
Pourquoi une telle désaffection ? Tout simplement à cause d’Elon Musk lui-même serait-on tenté de dire. Sa personnalité fantasque, ses opinions extrêmes, ne sont pas vraiment des atouts pour X. De plus, en décimant le personnel de Twitter, il a également ébranlé la confiance dans les contenus diffusés. Les opinions extrêmes y pullulent, les images et vidéos affreuses y sont légion. Tout ceci fait peur aux annonceurs qui ne veulent pas associer leur marque à des contenus qui risqueraient de leur porter préjudice.
X : changement de nom stratégique pour marquer un nouveau départ
C’est dans ce cadre je pense qu’il faut replacer le changement de nom. « X » (le nouveau nom de Twitter) marque clairement la fin de la période Musk. Parfois il suffit tout simplement de changer de nom pour se faire oublier. Et c’est exactement ce qui semble se passer.
Une CEO (une femme, respectée dans la profession) a pris les rênes de l’entreprise. Twitter est devenu X pour bien marquer le début d’une nouvelle époque. Tout est en place pour un nouveau départ. Le danger représenté par Musk étant plus faible, Linda Yaccarino aura beau jeu de faire revenir les annonceurs qu’elle connaît bien, puisqu’ils étaient déjà ses clients lorsqu’elle était la patronne de la publicité chez NBC Universal. Elle devra toutefois montrer plus qu’un changement de nom pour convaincre les annonceurs de revenir sur X. Dans un rare effort de transparence, Musk avait révélé une partie de la recette de ses algorithme de recommandation (accusés un temps de créer des bulles de filtres). Mais le vrai défi technique sera celui de la modération.
Le défi technique prioritaire : la modération
Sans modération, Twitter / X devient une caisse de résonnance formidable pour les extrémistes et ceux qui cherchent à désinformer. Entre opinions extrêmes et « fake news », ce réseau social n’aura sans doute jamais été aussi décrié. Les annonceurs ont horreur de cela. Que cela plaise à Elon Musk ou non, il va falloir que X s’assagisse pour retrouver la confiance de ses clients. C’est peut-être là que l’IA générative pourrait se révéler utile … à condition de réinvestir dans la recherche et la modération.
Une solution ne pourra de toute façon pas être trouvée à court terme. Musk a cassé son jouet à 44 milliards de dollars, et il va falloir prendre le temps de le réparer. Sa vision d’une application à tout faire de type WeChat n’a d’ailleurs aucun intérêt tant que le problème de la modération n’est pas résolu.
Une app à tout faire inspirée de WeChat : une lubie
Iriez-vous gérer votre vie sur une application dont les fondements sont ancrés dans la propagation de contenus extrêmes ? Que diriez-vous si votre banque diffusait en continu des contenus tous plus polarisants les uns que les autres ? Vous la quitteriez sans doute car cela ne cadre pas avec l’image que vous vous faites d’une banque. C’est la même chose pour X.
Son image est tellement dégradée qu’il sera difficile de l’associer à une application qui pourrait avoir un impact bien plus grand sur votre vie comme c’est le cas de WeChat en Chine. Et puis, même si cette application devait être lancée un jour, quel sort lui réserveraient les régulateurs ? Alors que les GAFAM sont critiqués pour leur emprise sur la vie digitale des êtres humains, serait-il raisonnable de laisser une application existante étendre son emprise ?
En conclusion
En conclusion, Twitter a été rebaptisé X pour marquer un nouveau départ et inaugurer l’ère post-Musk. Il faudra toutefois plus que cela pour faire revenir les annonceurs et remplir les caisses de Twitter. Toutes les petites initiatives de Musk ont été des échecs financiers, et seule la modération des contenus et le combat contre la désinformation pourrait aider X à retrouver la confiance de ses clients. Une image plus consensuelle est d’ailleurs un passage obligé si d’aventure Musk voulait vraiment lancer son application à tout faire inspirée de WeChat.
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