9 mars 2011 538 mots, 3 min. de lecture

Renouvelons les codes marketing du luxe

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Trop c’est trop … je lisais dans une revue grand public un article sur la chaîne de restauration Sushi Shop qui vient de faire « relooker » ses boîtes de sushis par Kenzo. Sushi Shop s’enorgueillit d’être une marque haut de gamme […]

Trop c’est trop … je lisais dans une revue grand public un article sur la chaîne de restauration Sushi Shop qui vient de faire « relooker » ses boîtes de sushis par Kenzo. Sushi Shop s’enorgueillit d’être une marque haut de gamme et tous les clichés de luxe y sont utilisés : boîte noire, sémantique adaptée (on parle de « collection » et d’éditions limitées »), ingrédients haut de gamme, accessoires (les baguettes) provenant d’une marque prestigieuse (Christofle) avec la possibilité, s’enthousiasme l’auteur de l’article, de faire graver ses initiales sur les baguettes.

J’ai eu l’impression de relire pour la nième fois le même article. Il aurait suffit de changer le nom « Sushi Shop » par « Nespresso » ou n’importe quelle autre marque souhaitant monter en gamme et le tour aurait été joué. Quand cela va-t-il enfin s’arrêter ? Quand arrêtera-t-on de prendre les consommateurs pour des gogos ?

J’ai la ferme impression depuis plusieurs années que les mêmes recettes sont appliquées sans discernement dans le secret espoir de se différencier de la concurrence en montant en gamme. Aucun secteur n’échappe à cette déferlante de marketing bon marché : alimentation bien sûr (allez faire un tout dans un magasin de chocolats, c’est à croire que tous ont eu le même consultant en image), mais également sites web, catalogues papier, … Tout le B2C est touché ce qui a pour conséquence de banaliser les codes marketing du luxe. Le challenge est intéressant pour ceux qui reconnaîtront le danger. Cette banalisation va s’accompagner à terme par un nivellement vers le bas. Ces petites astuces marketing ne produiront bientôt plus leurs effets à cause de la méfiance engendrée par les promesses non tenues et l’utilisation à outrance de signaux marketing dont le consommateur va faire une indigestion.

Le luxe doit et va se réinventer. Déjà Apple, marque de luxe au demeurant par les prix qu’elle pratique et les codes sociaux qu’elle véhicule, a inventé et imposé une nouvelle signalétique faite de simplicité et de pureté. Au royaume du blanc la couleur à bannir est le noir.

Je n’ai pas la prétention de prédire l’avenir mais j’ai la faiblesse de croire que les codes marketing du luxe ont désormais trop vécus pour encore faire illusion. J’entrevois une évolution où la valeur intrinsèque du produit (c’est-à-dire la valeur que le propriétaire en retire par l’usage) dépassera la valeur extrinsèque (c’est-à-dire la valeur retirée par le propriétaire par la possession et la projection sociale). Le luxe deviendra plus une affaire de reconnaissance entre initiés qu’un étalage bling bling. Le luxe 2.0 sera communautaire ou ne sera pas mais il ne s’agira pas d’une communauté à la web 2.0, étendue à tous, mais d’une communauté de micro-communautés. Déjà je soulignais dans un passé récent que la taille des logos diminuait avec le prix. Le vrai luxe ne se voit pas et ceux qui le mette en avant seront à moyen-terme ringardisés.



Publié dans Marketing.

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