31 mars 2016 615 mots, 3 min. de lecture

Les clients : dernier obstacle à une supply-chain parfaite ?

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Le cas Nespresso Prodigio montre que les entreprises tendent à implémenter des systèmes de commande de plus en plus automatisés afin de s’affranchir du dernier facteur d’incertitude dans la supply-chain : le client lui-même. Ce calcul vise bien entendu à […]

Le cas Nespresso Prodigio montre que les entreprises tendent à implémenter des systèmes de commande de plus en plus automatisés afin de s’affranchir du dernier facteur d’incertitude dans la supply-chain : le client lui-même. Ce calcul vise bien entendu à augmenter le taux de pénétration (défini chez Nespresso comme chez d’autres par le taux de rachat sur l’année) et par là-même les bénéfices.

Quand on y pense l’idée n’est pas mauvaise. Plutôt que de construire des algorithmes complexes pour prédire les comportements des clients, pourquoi ne pas simplement supprimer le facteur humain de cette même équation ? Si la valeur ajoutée proposée est suffisante, cela pourrait bien fonctionner.

La proposition de valeur Prodigio : assez pour faciliter le processus de décision du client ?

Voilà ce que Nespresso avait sans doute à l’esprit en concevant le système Prodigio. Ne jamais manquer de café pourrait bien être une proposition de valeur suffisamment intéressante pour le client qui du coup adhérerait également à un processus de commande automatisé. Mais une seule proposition de valeur ça fait un peu chiche pour une machine à plus de 250€. Alors Nespresso en a trouvé deux autres pour que le compte soit « rond » : programmer votre café à distance (via votre smartphone) et vous renseigner sur l’état de votre machine (par exemple, y-a-t-il encore assez d’eau ?). Ces deux propositions semblent au final assez faiblardes. Qui aurait besoin de programmer un café à l’avance alors que la vitesse (pré-chauffage + percolation) est depuis 20 ans la pierre angulaire de la stratégie marketing de Nespresso ?

L’affaire Nespresso est néanmoins un cas d’école très intéressant car il s’agit probablement de la première tentative à grande échelle visant à contrôler la supply-chain du début jusqu’à la fin (c’est-à-dire jusqu’au lieu-même de la consommation du produit). D’autres tentatives sont restées plus confidentielles.

Le projet Smart Drop d’Evian

En 2014, Evian a lancé son projet Smart Drop, un objet connecté design en forme de goutte d’eau qui devait permettre aux consommateurs de commander leurs bouteilles d’eau en quelques clics. Cet objet faisait partie de la stratégie d’Evian pour avoir une relation directe avec les clients et ainsi contourner les distributeurs.

Depuis 2014 Evian a toutefois cessé de communiquer sur ce projet qui n’aura sans doute pas passé le test de l’adoption.

Le réfrigérateur connecté

Le réfrigérateur connecté est une sorte de mythe marketing depuis plus de 10 ans. Plusieurs modèles sont présentés chaque année au CES de Las Vegas et le cru 2016 n’aura pas fait exception.

Le réfrigérateur connecté est le fantasme absolu des distributeurs. Non seulement il leur permettrait de savoir exactement ce que vous mangez / buvez et quand, mais il serait aussi, comme la machine Prodigio, la plateforme permettant de concrétiser la commande automatique, sans intervention humaine. Malheureusement il semble que les clients ne soient pas encore prêts à laisser la machine décider à leur place.

Conclusion

La plupart des experts marketing ne comprendront pas forcément l’importance de du jalon que représente la machine Prodigio. C’est un jalon essentiel dans le domaine de la logistique. La réaction des consommateurs et leur adoption éventuelle de Prodigio déterminera à coup sûr si d’autres projets de ce type se lanceront. Nous ne manquerons de suivre le devenir de Prodigio et l’émergence d’autres expérimentations du même genre.



Publié dans Innovation, Marketing, Stratégie.

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