23 avril 2020 601 mots, 3 min. de lecture

Mini-cours de Com n°3 : communication de masse et manipulation

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
La série Les mini-cours de com » est née de l’esprit fertile de mon ami Emmanuel Tourpe pendant la crise du coronavirus. Emmanuel est un professeur de communication et de philosophie bien connu; il est également directeur de la programmation d’ARTE […]

Emmanuel TourpeLa série Les mini-cours de com » est née de l’esprit fertile de mon ami Emmanuel Tourpe pendant la crise du coronavirus. Emmanuel est un professeur de communication et de philosophie bien connu; il est également directeur de la programmation d’ARTE (d’où la référence à cette chaîne dans son texte). Ses mini-cours de com, publiés à l’origine sur son profil Facebook, méritaient d’être partagés avec le plus grand nombre. Je le remercie d’avoir accepté qu’ils soient publiés ici.

Après le mini-cours sur les différents niveaux de communication (n°1), et celui sur convaincre sans manipuler (n°2), c’est le 3ème opus que nous vous proposons aujourd’hui.



Mini-cours de com n°3 :

La seringue hypodermique et autres histoires de grenouilles

Harold Dwight Lasswell

Harold Dwight Lasswell

Anecdote frappante : l’inventeur de la « communication politique » est aussi le principal théoricien de la « propagande ». Ah ah, c’est dire… Son nom est Harold Lasswell (1902-1978).

Tous les étudiants en com connaissent les « 5 W » (ou 5 Q en français) de Lasswell qui permettent de décomposer un message, quel qu’il soit, en 5 questions à se poser : Qui dit Quoi à Qui sur Quel support avec Quel effet ? Cela permet de vérifier que tous les éléments d’une communication ont été pris en compte. Par exemple : quand j’écris un mail, je dois me rappeler que sur ce support mes émotions ne sont pas connotées : c’est un media « froid », qui va prêter à de multiples interprétations puisque le lecteur va devoir imaginer mon état d’esprit.

Mais Lasswell est aussi le grand penseur de la manipulation mentale. C’est lui qui a fourni parmi les plus grandes théories sur la manière de manipuler les foules par les médias. Il a nommé l’effet de ceux-ci une « seringue hypodermique » : cette piqûre qui injecte son contenu sans même qu’on s’en rende compte. Une autre version plus populaire est l’histoire bien connue des grenouilles vivantes qui se laissent peu à peu cuire dans une eau que l’on réchauffe lentement.

L’idée de Lasswell est que les messages véhiculés dans une communication de masse passent peu à peu dans la conscience des gens sans qu’ils s’en rendent compte. Un exemple très simple : l’obnubilation de nos journaux télévisées (sauf celui d’Arte ! ?) par le seul Coronavirus nous fait perdre peu à peu le sens des autres réalités : celles des migrants parqués en Grèce, des marchés aux esclaves en Lybie, ou même ce qui se passe dans d’autres pays que le nôtre. Un message sous-jacent passe peu à peu dans notre esprit.

Cela est vrai de tout un ensemble d’éléments de notre culture commune : notre rapport à l’argent, à l’éthique, au travail, à la famille est en fait façonné sans que nous nous en rendions compte par un tout petit milieu de journalistes parisiens ou bruxellois qui nous instillent leur vision du monde.
Que ce confinement soit l’occasion de revoir nos manières de penser et de nous éduquer aux médias : en regardant ou en lisant d’autres sources d’information que d’habitude (Arte, Courrier international…). Il faut tuer le bouddha BFM en nous. Tout peut être mis à distance et repensé. C’est une chance contre la seringue hypodermique.



Publié dans Divers.

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