5 décembre 2011 637 mots, 3 min. de lecture

Comment annoncer une mauvaise nouvelle à ses clients ? Suivez l’exemple d’ING

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
ING essaye de justifier ses réductions de coûts en faisant porter le chapeau à d’autres. Le sujet du jour s’éloigne du marketing mais touche quand même à un aspect crucial : la communication avec le client. ING vient d’annoncer coup […]

ING essaye de justifier ses réductions de coûts en faisant porter le chapeau à d’autres.
Le sujet du jour s’éloigne du marketing mais touche quand même à un aspect crucial : la communication avec le client.
ING vient d’annoncer coup sur coup une réduction à 0,05% (autant dire rien) de ses comptes courants et à 1%+0,25% de son compte d’épargne le plus populaire (le livret vert). Ces annonces ne passent pas inaperçues dans le contexte actuel d’austérité et les mesures prises par ING méritent une petite relecture.
Comment une banque doit-elle procéder pour réduire ses coûts ? C’est simple. Alors qu’auparavant elles s’attaquaient aux coûts structurels (personnel, coûts de fonctionnement, …) ING vient de s’apercevoir qu’il était plus efficace de diminuer les montants payées par la banque à ses clients. En gros, il est plus simple de diminuer les taux d’intérêts. Et comme il est mal vu de prendre une décision unilatérale, les linguistes nous expliquent qu’une des stratégies consiste à reporter la faute sur quelqu’un d’autre. Ce sera la Banque Centrale Européenne. Voici l’explication fournie par ING à ses clients :

Les taux d’intérêt des marchés financiers, à court terme (Banque Centrale Européenne) et à long terme (Intrest Rate Swap), sont à la baisse. Cette situation nous amène à modifier la prime de fidélité sur le Livret Vert ING.
À partir du 9 décembre 2011, les taux* suivants seront applicables sur le Livret Vert ING : taux de base de 1,00 % (inchangé) + prime de fidélité de 0,25 % (au lieu de 0,50 % précédemment).

La question que je me suis posée était de savoir si le rejet de la faute sur la BCE était justifié. Il m’a fallu beaucoup de perspicacité pour dénicher l’historique des taux d’intérêt du livret vert ING, mais j’ai fini par les trouver. En comparant leur évolution à celle des taux directeurs de la BCE, on constate pas mal de choses intéressantes :

  • Le taux de base (1%) du livret vert est quasiment constant depuis des années et les fluctuations sont absorbées via la « prime de fidélité »
  • Les augmentations du taux directeur de la BCE opérées en avril 2011 et juillet 2011 n’ont pas conduit à une augmentation du taux d’intérêt du livret vert
  • Le taux directeur de la BCE est le même qu’en avril 2011 et pourtant ING baisse ses taux d’intérêts. On peut donc remettre en doute l’argumentation d’ING

 

Très intéressant également est le graphique qui présente le différentiel entre la somme (taux de base+prime de fidélité) et le taux directeur de la BCE. On s’aperçoit nettement qu’ING a entamé en Mars 2011 un mouvement de resserrement et que le taux actuellement servi est le même que le taux directeur de la BCE.


Pour finir (et c’est une moins bonne nouvelle pour les épargnants) regardez ce dernier graphique où le taux cumulé (taux de base + prime de fidélité) est mis en regard de l’indice à la consommation. L’écart étant désormais nul entre le taux directeur de la BCE et le taux d’intérêt ING, plus rien ne vient compenser une inflation galopante et la perte du pouvoir d’achat s’accélère.

 

Mon avis :

La BCE a bon dos mais comme personne ne prendra la peine d’aller vérifier si l’explication a du sens, la majorité des clients s’en contentera. Je parie que cette décision d’ING sera imitée par les autres banques qui y verront une permission de faire la même chose.

 



Publié dans Stratégie.

Donnez votre avis

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *