11 septembre 2020 1396 mots, 6 min. de lecture Dernière mise à jour : 12 octobre 2020

Covid-19 : le marché des voitures de luxe ne suit pas les mêmes tendances

Par Lorène Fauvelle Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Mise à jour : 12 octobre 2020. Le marché de l’automobile a été touché par la crise du Covid, comme de nombreux secteurs. Alors que les ventes annuelles sont à la baisse pour de nombreux constructeurs et concessionnaires, qu’en est-il […]

Mise à jour : 12 octobre 2020.
Le marché de l’automobile a été touché par la crise du Covid, comme de nombreux secteurs. Alors que les ventes annuelles sont à la baisse pour de nombreux constructeurs et concessionnaires, qu’en est-il des voitures de luxe ?

Si vous n’avez que 30 secondes

  • Le marché automobile européen (voire mondial) devrait chuter d’environ 25% sur l’année 2020 par rapport à l’année précédente (ACEA).
  • Cette baisse est la plus forte jamais enregistrée sur le marché automobile européen.
  • Alors que depuis 2019, le marché automobile mondial est ralenti, les acteurs du luxe automobile ne semblent pas être touchés (Lamborghini : +43%, Rolls-Royce : +25%, Porsche : +10%).
  • Les constructeurs considérés comme premium (Mercedes, BMW, Audi pour les marques allemandes) voient leurs chiffres baisser en 2020 partout dans le monde, excepté en Chine où leurs ventes sont à la hausse par rapport à 2019.

Sommaire

A quoi ressemblait le marché automobile mondial avant la crise du Covid ?

Face à l’évolution constante des normes et des incitatifs fiscaux que nous vous avons détaillés dans un article précédent, les marques doivent toutefois prendre des mesures et s’adapter afin de coller aux nouvelles exigences, notamment européennes.

2018 sonnait la chute des actions des équipementiers automobiles, avec son impact sur les constructeurs. 2019 s’est toutefois déroulée sous de meilleurs augures. Mais cela ne concerne pas (ou peu) les marques automobiles du luxe.

Que définit-on sous le terme « voitures de luxe » ?

Les grandes marques de l’automobile de luxe sont bien connues : Rolls-Royce, Ferrari, Lamborghini, Bentley, etc… Ces véhicules de luxe se distinguent par leur conception, leurs options, mais également par le nombre d’exemplaires mis sur le marché. En somme, ce sont le prix et l’exclusivité qui en font des véhicules et des marques de luxe.

En 2019, la célèbre marque anglaise Bentley réalise presque autant de ventes à Monaco que dans ses quatre concessions situées à Paris, Lyon, Bordeaux et Cannes. La culture, l’absence de constructeur national, les taxes et les mouvements sociaux, notamment des gilets jaunes, sont mis en cause : les voitures de luxe ne semblent pas être la tasse de thé des français. Notons toutefois que le volume de vente est en hausse pour la majorité des marques automobiles de luxe sur l’hexagone.

Marque Unités vendues en France en 2019 Evolution par rapport à 2018
Porsche 5 572 +22%
Alpine 3 172 +174%
Maserati 420 -31%
Ferrari 339 +26%
Lotus 190 +37%
Lamborghini 156 +93%
Caterham 101 +42%
Aston Martin 92 +10%
Bentley 84 +2%
Morgan 50 -18%
McLaren 24 -8%
Rolls-Royce 10 -38%
Dallara 1 n/a
KTM 1 -50%

En Belgique, la vision est quelque peu différente. En 2018, Porsche comptabilise 3 222 immatriculations sur le territoire belge. Quoique, nombreux s’accordent à dire que Porsche ne fait pas partie des acteurs du marché automobile de luxe. Et pour cause : la marque propose des prix plus « abordables » (à moins de 100 000 euros) et produit de nombreux véhicules destinés à la vente, ce qui fait du constructeur un acteur de la branche supérieure du premium, mais n’est pas considéré par tous comme du luxe.

Immatriculations de voitures neuves par marque en Belgique (source : Febiac)
2018 2019 Evolution en %
JAGUAR 3.957 3.174 -19,79
PORSCHE 3.222 2.754 -14,53
LEXUS 1.468 1.479 0,75
ALPINE 73 232 217,81
MASERATI 222 174 -21,62
FERRARI 100 127 27,00
BENTLEY 70 96 37,14
LOTUS 34 45 32,35
ASTON MARTIN 57 44 -22,81
LAMBORGHINI 22 33 50,00
ROLLS-ROYCE 15 30 100,00
MORGAN 27 24 -11,11
INFINITI 166 21 -87,35
MCLAREN 21 17 -19,05
ALPINA 15 11 -26,67
CATERHAM 8 8 0,00
CADILLAC 11 1 -90,91

Quelle est la situation en 2020 pour le marché automobile ?

Au cours du premier semestre 2020, les ventes de voitures ont chuté de 25% dans le monde. La Belgique n’est pas en reste avec plus de 26% de baisse des immatriculations par rapport à 2019.

Le nombre de Ferrari, Porsche ou Lamborghini immatriculées en Belgique en 2020 ne semble pas avoir été impacté par la crise sanitaire. Ceci s’explique notamment par un temps d’attente allant jusqu’à 2 ans entre la commande du consommateur et la réception du véhicule. Les effets du covid-19 sur les véhicules de luxe seront de fait plus visibles sur le chiffre d’affaires annuel et sur le nombre d’immatriculations en 2021 voire 2022.

Que se passe-t-il sur le marché automobile international ?

Le marché automobile chinois, qui a connu la crise sanitaire et a été confiné bien avant l’Europe montre des signes de reprise avec des +7% de ventes en juin 2020 par rapport à l’année précédente malgré une baisse générale de volumes vendus (-13% par rapport à 2019).

Région Ventes de véhicules (2019, en M d’unités) Ventes de véhicules (estimations 2020, en M d’unités) Différence (%)
Chine 25.7 21.9 -14,8%
Etats-Unis 17.6 13.4 -23,9%
Europe 18.3 13.6 -25.7%
Reste du monde 26.4 23.0 -19%
Total 90.0 71.9 -20,1%

Les Etats-Unis voient leurs chiffres baisser drastiquement avec -19% de ventes en juin 2020 par rapport à juin 2019. Counterpoint estime que les Etats-Unis verront, d’ici fin 2020, une baisse annuelle de 24% ce qui, à ce jour, est très proche des données mondiales annoncées et estimées par les experts.

En effet, les ventes de véhicules ont quant à elles chuté de 36% en Europe depuis début 2020. La reprise est également dans le viseur avec la réouverture de concessionnaires depuis juin 2020. Toutefois, la perte annuelle sera considérable pour le secteur automobile qui a déjà fait face à de gros challenges normatifs en 2018 et 2019.

L’ACEA (European Automotible Manufacturers Association) a recensé le nombre d’immatriculations en Europe durant la crise du Covid.

Immatriculations de véhicules commerciaux (Europe, par rapport à 2019) Immatriculations de véhicules particuliers (Europe, par rapport à 2019)
Janvier 2020 -11,5% -7,5%
Février 2020 -6,2% -7,4%
Mars 2020 -47,3% -55,1%
Avril 2020 -67% -76,3%
Mai 2020 -44,4% -52,3%
Juin 2020 -20,3% -22,3%
Cumul 1er semestre 2020 -33,7% -38,1%

L’ACEA estime que les ventes de véhicules neufs seront, en 2020, les plus basses enregistrées depuis 2013, année consécutive à 6 ans de déclin suite à la crise de 2008-2009. (ACEA)

Par rapport aux mêmes périodes en 2019, la France enregistre une baisse de 72,2% de ventes de véhicules particuliers en mars 2020, -88,8% en avril et -50,3% en mai (Auto Moto) pour un cumul à -32% sur le premier semestre 2020 par rapport au premier semestre 2019.

Le marché automobile belge en 2020

Prévisions des ventes pour 2020 :

  • Philippe Donnay, commissaire au Plan, estime que l’année 2020 représentera la plus forte récession que la Belgique ait connue.
  • La Febiac prévoit que 431 000 nouvelles automobiles seront mises en circulation en 2020, un nombre bien inférieur au record le plus bas enregistré en Belgique à ce jour (458 796 nouvelles immatriculations en 2003). Il faudra attendre la fin d’année pour confirmer ces chiffres.

Leasing :

  • Le marché du leasing professionnel freine de 20% dû à la baisse du recrutement ainsi que des déplacements professionnels et de la pratique du télétravail.

Ils se portent bien :

  • Le groupe Ginion (7 implantations + 9 showrooms) enregistre de belles ventes et estime que cela vient principalement du fait que leurs clients font partie de ceux ayant été peu impactés par la crise sanitaire.
  • Les ventes de Ferrari sont en croissance sur l’année 2020 par rapport à 2019.

Perspectives de reprise :

  • La reprise enregistrée pendant l’été est retombée avec la fin de l’été et des promotions. L’incertitude économique impacte également les comportements clients qui développent une crainte de s’engager sur des dépenses les impliquant sur le long terme.
  • Les experts et acteurs du marché automobile considèrent qu’il faudra environ 3 ans pour observer une reprise totale du marché.

Conclusion

Le volume des ventes de véhicules, qu’ils soient à usage commercial ou privatif, est en chute libre partout dans le monde depuis l’éclatement de la crise sanitaire. Le marché chinois ayant été le premier à être confiné et déconfiné, est également le premier à réinvestir et on voit déjà les chiffres remonter petit à petit en Europe. La remontée du marché automobile sera toutefois une course de longue haleine puisque les nouvelles normes WLTP ont également un poids sur les constructeurs automobiles. Les conséquences sur le marché de l’automobile de luxe seront concrètement visible sur le chiffre d’affaires engendré en 2020 et les immatriculations de 2021 et 2022 étant donné les délais de réception de ces véhicules à part entière.

Images : Shutterstock



Publié dans LUXE.

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